Le manque de foin touche de nombreux éleveurs de l’Hérault en cette période estivale.
Pas besoin d’être un expert pour se rendre compte qu’il n’a pas plu dans les prés depuis longtemps. La couleur terne et blanchâtre de l’herbe en est une preuve évidente. « Quand tu arrives devant la prairie et que tu vois ce désert, ça suffit à te faire sauter au plafond », explique André Vitou, responsable du troupeau du Levant sur la commune de Marsillargues. Depuis juin, l’herbe manque et ce manadier, agriculteur et éleveur puise dans ses ressources hivernales pour nourrir son bétail. « La majorité des manadiers locaux sont aussi dans ce cas », dit-il, l’air sérieux.
Les taureaux et les chevaux vont-ils manquer de foin dès la rentrée ? Si André Vitou semble avoir trouvé une solution avec un confrère agriculteur du département pour ses 200 bovins et trente chevaux, il s’inquiète pour ceux qui ont déjà du mal à se réapprovisionner. « On est sur deux tonnes par jour en hiver, ce qui représente environ 50.000 à 60.000 euros à débourser par an. » Un prix qui pourrait être revu à la hausse dans les prochains mois. « Tout le monde est demandé, on ne sait plus où chercher pour le trouver, et à quel prix on peut l’acheter. Mais ce qui est sûr, c’est qu’on n’arrivera pas au mois de mai prochain à ce rythme-là. »
Une épreuve supplémentaire à surmonter, après deux ans de covid, particulièrement difficile pour la profession. « Nous sommes coupés dans nos traces. Nous avons dû demander de l’aide pendant la crise sanitaire. Maintenant que nous pensions laisser cela derrière nous, nous nous retrouvons face à un problème que nous ne savons pas résoudre.
15 000 taureaux camarguais
Les manadiers ont cependant eu un été plutôt fructueux. Les fêtes votives battent leur plein depuis début juillet et les communes comptent sur leurs services pour attirer du monde. « On sent un vrai engouement autour des fêtes cette année, les gens ont besoin de sortir et de penser à autre chose », souligne André Vitou, qui perçoit une volonté des comités et des communes de soutenir les éleveurs de la région. « Les prix des services ont augmenté, ce qui nous permet de compenser de notre côté. Nous sommes très occupés, nous sommes pressés comme on dit. »
Au cœur de la Camargue, les manadiers entretiennent un très large éventail de traditions locales. Entre tourisme et préservation des espèces, le monde de bouvine participe activement à faire vivre le territoire. « La race de taureaux camarguais est une race relique, menacée. Il n’y a que 15 000 têtes, toutes régions confondues. Donc on espère vraiment ne pas avoir à en éliminer une cette année. » Sous sa casquette de membre de la fédération des manadiers, André Vitou espère pouvoir compter sur les pouvoirs publics. « J’ai confiance. Ils nous ont prouvé qu’ils nous soutenaient pendant la crise du Covid-19, que ce soit au niveau de la Région Occitanie, des Communautés de Communes de Lunel ou du Pays de l’Or, et des communes, comme Mauguio par exemple. »
Des aides financières seront sûrement nécessaires pour permettre aux dirigeants de garder la tête hors de l’eau. Il y a quelques jours, Jérôme Bertrand, du troupeau du Gardon, annonçait qu’il ne sortirait plus son bétail aux manifestations votives, sous la forte chaleur, alors que les quantités de foin s’amenuisaient.